Fonctions d’une variable complexe
Il n’existe pas d’idée franchement mauvaise... Ce qui est franchement mauvais, c’est de ne pas avoir d’idée du tout.
Georges Polyà
Augustin Louis Cauchy 1789 - 1857 |
Karl Friedrich Gauss 1777 - 1855 |
Bernhard Riemann 1826 - 1866 |
Karl Weierstrass 1815 - 1897 |
Niels Hendrik Abel |
Henri Poincaré 1854 - 1912 |
Jacques Hadamard 1865 - 1963 |
Hermann Weyl 1885 - 1955 |
Note de lecture : chaque chapitre s'ouvre dans une nouvelle fenêtre.
1. Introduction et bibliographie
2-1 : Rappels
2-2 : Fonctions analytiques
2-3 : Chemins
2-4 : Indice d’un chemin
2-5 : Formule de Cauchy
2-6 : Séries de Laurent
2-7 : Représentation par des intégrales
2-8 : Pôles et fonctions méromorphes
2-9 : Résidus
2-10 : Calcul d’intégrales immondes
2-11 : Lemme de Jordan
3-1 : Une fonction holomorphe est une application conforme
3-2 : Quelques remarques
3-3 : La fonction homographique
3-4 : Transformations et géométrie de Poincaré
3-5 : Transformations du cercle
3-6 : Conclusion
4. Séries et produits de fonctions
4-1 : Le prolongement analytique (analytic continuation in english, Fortsetzung in deutsch)
4-2 : Principe du maximum
4-3 : Sinus comme produit infini
4-4 : Produits infinis
4-5 : Les produits de Weierstrass
4-6 : Ordre d’une fonction
La théorie des fonctions de la variable complexe a occupé de nombreux mathématiciens pendant tout le 19ème siècle et une bonne partie du 20ème. L’essentiel de la théorie sera développé par Cauchy, Riemann, Weierstrass et finalisée en partie avec les travaux d’Henri Poincaré sur les fonctions automorphes. Cette théorie est reliée en partie au développement de la Physique et tout particulièrement à celui de l’électromagnétisme ; les théories de la transformée de Fourier puis celle de Laplace-Carson ainsi que la naissance du calcul symbolique d’Oliver Heaviside montreront bien la puissance des outils considérés ; tout ceci aboutira à la généralisation la plus forte avec la théorie des distributions de Laurent Schwarz en 1945. Par ailleurs nombre de questions touchant aux mathématiques modernes se développeront pendant tout le 19ème siècle et nous ne pouvons que citer l’avant-propos de l’Abrégé d’histoire des mathématiques de Jean Dieudonné :
Au 18ème siècle, c’est l’Analyse qui domine, accumulant les succès spectaculaires dans ses applications à la Géométrie, à la Mécanique, à l’Astronomie et au Calcul des Probabilités. A près une sorte de pause de 1780 à 1810 environ, elle reprend dans tous les domaines sa marche conquérante, avec le prodigieux développement de la théorie des fonctions analytiques d’une variable complexe, et ce qui en est sans doute le plus étonnant chapitre, la découverte et l’étude des fonctions elliptiques, des fonctions abéliennes et des fonctions modulaires et automorphes, dont on peut dire, sans exagération qu’il constitue vraiment le cœur des mathématiques du 19ème siècle. Par ses ramifications variées, la théorie es fonctions elliptiques et des fonctions modulaires est en effet en contact, aussi bien avec le renouveau de l’Algèbre à cette époque […], qu’avec l’extraordianire floraison de la théorie des nombres algébriques qui commence avec Gauss, dont elle ne saurait se dissocier et à laquelle elle fournit ses thèmes les plus profonds ; tandis que c’est des problèmes de la théorie des fonctions abéliennes que vont naître, avec Riemann, la Géométrie algébrique et la Topologie modernes.
C’est au cours de ces développements que les mathématiciens de cette période se voient amenés insensiblement, et non de propos délibéré, à concevoir quantité d’ « êtres abstraits » nouveaux : espaces de dimension arbitraire, structures algébriques et topologiques variées, etc., qui n’ont plus que des liens ténus avec les notions classiques de « nombre » et de « figure », mais sans lesquels les résultats nouveaux ne peuvent acquérir toute leur portée. […] Ainsi, à la fin du siècle, tous les thèmes des mathématiques actuelles ont été dégagés.
Historiquement parlant citons H. Poincaré qui fait un résumé rapide de la chose (L’œuvre mathématique de Weierstrass in Acta mathematica - Suède, tome 22 - 1899) :
La théorie moderne des fonctions analytiques a eu quatre fondateurs : Gauss, Cauchy, Riemann et Weierstrass. Gauss n’a rien publié de son vivant ; il n’avait pour ainsi dire rien communiqué à personne et ses manuscrits n’ont été retrouvés que longtemps après sa mort. Il n’a donc exercé aucune influence [1]. […]
Cauchy a précédé les deux autres et leur a montré le chemin ; mais néanmoins les trois conceptions restent distinctes et cela est fort heureux puisque nous avons ainsi trois instruments entre lesquels nous pouvons choisir et dont nous pouvons souvent combiner l’action.
Pour Cauchy la définition de la fonction conserve encore un peu de l’indécision qu’elle avait chez ses devanciers. […] Une fonction quelconque peut être représentée par une intégrale définie et devient aussi maniable pour l’analyste, quelque vaguement définie qu’elle ait été au début. […]
Pour Riemann, l’image géométrique joue le rôle dominant ; une fonction n’est qu’une des lois d’après lesquelles les surfaces peuvent se transformer ; on cherche à se représenter ces transformations et non à les analyser ; leur possibilité même n’est établie que par un raisonnement sommaire auquel on n’a pu, beaucoup plus tard, donner la rigueur qu’aux prix de modifications profondes et de détours compliqués [2].
Weierstrass se place à l’extrême opposé : le point de départ est la série de puissances, l’élément de la fonction qui est confiné dans un cercle de convergence ; pour poursuivre la fonction en dehors de ce cercle, nous avons le procédé de la continuation anlytique ; tout devient ainsi une conséquence de la théorie des séries et cette théorie est elle-même établie sur des bases atithmétiques et solides.
Grosso-modo et pour simplifier, les distributions sont un aboutissement de la théorie linéaire des fonctions, quoique la découverte des ondelettes il y a une vingtaine d’années laisse supposer que de nombreux terrains de chasse restent ouverts… Mais un autre aspect non négligeable est la question de la non-linéarité, et là-encore de multiples champs d’investigation restent à explorer : l’exemple des fonctions modulaires, des splines, des solutions d’EDP en hydrodynamique, etc. sont là pour nous rappeler que l’exploration du domaine complexe est loin d’être finie et ceci sans parler des espaces et particulièrement des quaternions et des octonions.
L’unification des différents chapitres de la Physique moderne sous la bannière des champs a montré la profonde unité des principaux concepts ; il reste encore un lourd travail à effectuer : tout réécrire en utilisant les algèbres de nombres comme les quaternions ou les hypernombres comme ceux de C. Davenport. Cette simplification fondamentale permettra alors forcément de nouvelles avancées.
Nous ne pouvons que conseiller à tout étudiant en Sciences « dures », Mathématiques et/ou Physique, de lire et approfondir les notions ici présentées. La bibliographie fournit un éventail relativement large d’ouvrages, certains très accessibles, d’autres moins, mais tous présentent un intérêt certain et différent.
Le texte suit en partie le plan du livre de Henri Cartan, lequel développe la théorie de Cauchy améliorée par E. Artin, mais en dévie sur certains plans comme la conformité et le prolongement analytique. Pour ce qui est de la théorie de Riemann, trop longue à traiter ici, le lecteur pourra consulter [App], [Val] et [Cha]. Par ailleurs une partie des utilisations de la théorie est développée dans d’autres parties disponibles sur le site pour certaines :
Fourier (en préparation),
Les polynômes orthogonaux (en préparation),
Les fonctions elliptiques (en préparation).
[Ang] A. Angot, Compléments de Mathématiques, Masson et Cie, 1970
Très clair et succinct, amplement suffisant jusqu’en Spé. On le trouve parfois d’occasion.
[App] W. Appel, Mathématiques pour la physique et les physiciens, H&K éd., 2002
Passe un peu vite sur pas mal de trucs, mais reste compréhensible.
[Die] J. Dieudonné et al., Abrégé d’histoire des Mathématiques, ch. 4 (J. L. Verley)
Il est recommandé de lire ce chapitre avant et après avoir lu le texte qui suit…
[Edw] H. M. Edwards, Riemann’s Zeta Function, Dover Pub., 1974 (2001)
Si vous le trouvez ouvrez votre portefeuille, c’est la référence.
[God] R. Godement, Analyse Mathématique, vol 1 à 4, Springer, 2000-2004
Si vous allez au-delà de bac + 2 indispensable.
Indispensable pour les idées de base.
[Hoc] H. Hochstadt, Les fonctions de la physique mathématique, Masson et Cie, 1973
Epuisé, mais très intéressant ; les calculs sont parfois rudes mais méritent de s’y attarder.
[Rud] W. Rudin, Analyse réelle et complexe, Dunod, 1998
Traitement moderne de l’analyse complexe, niveau bac+4. Commentaires historiques par Jean Dhombres.
Assez cher (à faire acheter par votre bibliothèque préférée…), mais fournit un bon catalogue des propriétés fondamentales des principales fonctions utiles.
[Zis] M. Zissman, Mathématiques pour l’agrégation, Dunod, 1996
Beaucoup de choses qui partent dans beaucoup de directions.
[Uni] Encyclopédie Universalis, ed. électronique, 2004, article Fonctions analytiques et sq.
Sur internet :
http://www.meca.unicaen.fr/Enseignement/Licence/Math/cours/cours.html
http://yttriumath.free.fr/math/licence/sommaire.htm
http://www.cpge-cpa.ac.ma/cpa/maths/dudeComplexe.pdf
http://www.dptmaths.ens-cachan.fr/IMG/pdf/cours_ana_compl_desvillettes.pdf
Sur Gallica : http://gallica.bnf.fr/ on trouve pas mal de choses, voir particulièrement :
P. Appell, Principes de la théorie des fonctions elliptiques et applications
Briot et Bouquet, Etude des fonctions d’une variable imaginaire
B. Riemann, Œuvres complètes (avec particulièrement la « dissertation inaugurale », n°173)
N. H. Abel, Œuvres complètes
A. Cauchy, Œuvres complètes
J. Liouville, Journal de Mathématiques pures et appliquées (tous les volumes…)
[1] Cette affirmation de Poincaré est à prendre avec des pincettes : la thèse de Riemann a été supervsée par Gauss, et les problèmes géométriques soulevés sont permanents dans les deux œuvres. Par ailleurs Eisenstein, qui travailla beaucoup sur les séries doublement périodiques qui aboutiront aux fonctions elliptiques était l’élève préféré de Gauss…
[2] Poincaré écrit en 1899 : Hermann Weyl reprendra tous les théorèmes de Riemann lorsqu’il publia Die Idee der Riemannschen Fläche (1913) qui unifiait l'analyse, la géométrie et la topologie. Il produisit alors la première théorie unifiée dans laquelle le champ électromagnétique de Maxwell et le champ gravitationnel apparaissaient comme des propriétés géométriques de l'espace-temps.