L’arithmétique qui fut un des sujets les plus attractifs pour les Grecs fut oubliée pendant près de quatorze siècles : de Diophante (vers 200 ap. J.- C.) à Pierre de Fermat (vers 1650) il n’y eut pratiquement aucun résultat nouveau de découvert. Ce dernier s’intéressa plutôt à la résolution d’équations diophantiennes (les équations à résoudre en nombres entiers) et laissa de côté une partie fondamentale de l’étude des nombres entiers : la question de leurs diviseurs.
Cent ans plus tard Euler reprit une partie du travail de Fermat et commença à développer cette branche : on lui doit de nombreux résultats et théorèmes en Théorie des Nombres.
Prenons un nombre entier comme 200 : si on effectue sa
décomposition en facteurs premiers on obtient ;
tous ses diviseurs seront alors constitués de toutes les puissances de 2 et 5,
lesdites puissances étant comprises entre 0 et 3 pour 2, 0 et 2 pour 5.
En fait il est facile de voir que les diviseurs sont alors
2050, 2150, 2250, 2350, 2051, 2151, 2251, 2351, 2052, 2152, 2252, 2352 ;
ils sont donc au nombre de 4.3 = 12.
Généralisons : un nombre N s’écrit où les pi sont des nombres
premiers ; le nombre de ses diviseurs est alors
.
Faisons maintenant le produit de deux nombres ayant chacun deux facteurs premiers dont un en commun :
,
et
,
on a alors
,
et
.
Y-a-t’il un lien entre les deux ?
On peut évidemment écrire avec égalité lorsque N et M
sont premiers entre eux puisque dans ce cas tous les facteurs premiers de l’un
sont différents des facteurs premiers de l’autre.
Inversement si on prend un nombre N quel est le
nombre d’entiers, noté (N),
qui sont premiers avec lui ? On a par exemple
(2) = 1,
(3) = 2,
(4) = 2,
(5) = 4,
…
Cette fonction est appelée indicatrice d’Euler et joue un grand rôle dans l’étude des nombres premiers.
Première constatation, si N est un nombre premier, il
est divisible par 1 et par lui-même, on a donc ;
de même si on prend deux entiers premiers entre eux, on a
:
d’après ce que nous avons dit précédemment
est en fait le nombre de produits dans
et l’égalité
entraine
.
Supposons maintenant que N est de la forme pk avec p premier : tous les nombres de la forme p, 2p, 3p,… (pk−1 − 1)p ont un facteur commun avec N : ils sont donc au nombre de pk−1 − 1.
Vérifions avec N = 23 = 8 :
on a 2, 4, 6, soit 3 nombres non premiers avec N. Comme il y a pk − 1 nombres
inférieurs à N, il reste au total nombres premiers avec N et
.
Nous pouvons maintenant conclure grâce à la multiplicativité
de :
si
alors
.
Grâce à un petit programme écrit en Maple nous allons voir
la fonction .
fig. 1 : Indicatrice d’Euler,
fig. 2 : Indicatrice d’Euler (points)
Voici le programme Maple :
> compte:= proc(n)
> local c, i, L;
> c:=0;
> for i from 1 to n-1 do
L:=igcd(n,i);
if (L=1) then c:=c+1; fi;
#ou bien end if ;
od; #ou end do; suivant les versions
> c;
> end:
# petite procédure calculant le nombre d’entiers premiers avec n.
> n:=1000; m:=3000; L:=NULL;
> for i from n to m do L:=L,[i,compte(i)]; od:
> plot([L],color=black, font=[HELVETICA,10]);
> plot([L],color=black,style=POINT, symbol=CIRCLE, symbolsize=2, font=[HELVETICA,10]);
(le # signale un commentaire non pris en compte par Maple.)
La deuxième représentation fait apparaître des droites : celle du dessus correspond aux nombres premiers qui ont le plus de non-diviseurs. On peut alors chercher quels sont les nombres correspondant aux autres alignements… et quels sont ceux qui ont le moins de non-diviseurs.
Reprenons N = pk , p premier, et calculons la somme de l’indicatrice d’Euler appliquée à TOUS les diviseurs de N ; ce sont évidemment les nombres 1, p, p2,…, pk et on cherche :
,
soit
.
Prenons maintenant un nombre constitué d’un produit de deux
termes : ,
tous les diviseurs sont de la forme
et la somme des diviseurs de N
est :
Appliquons exactement la même chose avec :
Comme ceci est évidemment valable avec un nombre quelconque de termes dans N, on conclut que
.
Il est quand même très étonnant que N puisse s’écrire comme la somme du nombre de termes premiers qui compose chacun de ses diviseurs… mais ça se sont les miracles des suites géométriques !
On termine avec un dernier résultat ; le théorème de
Fermat se généralise de la manière suivante : si N est premier avec
a, alors (la démonstration en est laissée au lecteur).