L’équation de Van der Waals

 

Johannes Van der Waals, prix Nobel de Chimie 1904

 

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1. Quelques équations d’état

2. L’équation de Van der Waals

3. Retour aux équations

 

1. Quelques équations d’état

La loi des gaz parfaits  relie pression et volume d’un gaz au nombre N de moles de gaz dans le volume V et la température. La constante R vaut  et est liée au nombre d’Avogadro NA et à la constante de Boltzmann  (en fait ).

A température constante la courbe

est une isotherme (à pression constante ce serait une isobare) dont la forme est une hyperbole.

L’inconvénient de cette loi est qu’elle ne fait pas apparaître les changements d’état du gaz (changements de phase) lorsque ce dernier passe de l’état gazeux à l’état liquide ou solide lorsque la température diminue. Même si l’approximation des gaz parfaits est valable pour des pressions faibles, elle ne le rete pas très longtemps.

 

A la suite de nombreuses expériences les chimistes et physiciens du 19e siècle ont proposé d’autres équations d’état :

on note  le volume molaire (volume occupé par une mole de gaz, soit contenant NA molécules : ) ; les nombres a et b sont des constantes caractéristiques de chaque gaz.

Mariotte-Boyle :

 ;

Berthelot :

 ;

Van der Waals :

 ;

Dieterici :

 ;

enfin la plus générale, l’équation du viriel proposée par Kamerlingh Onnes (vers 1920) :

B, C, … sont des fonctions de la température. Aux petits ordres le viriel est semblable aux autres relations, les fonctions B, C, etc. peuvent s’exprimer en fonction des constantes a et b.

2. L’équation de Van der Waals

Intéressons nous de plus près à l’équation de Van der Waals ; dans l’équation des gaz parfaits on ne tient pas compte de l’attraction entre les molécules : lorsqu’une molécule s’approche de la paroi d’un récipient la pression (la vitesse de la molécule) est modifiée par l’attraction qu’exercent sur elle les autres molécules, on doit donc avoir quelque chose de la forme

,

u étant à trouver. De même les molécules présentent un certain volume à l’intérieur de Vm qui n’est pas disponible pour le déplacement des autres molécules ; on doit donc introduire un terme correctif dans Vm  et le remplacer par  ; en fait c’est la fonction u la plus complexe dans l’affaire et c’est elle qui est la cause des différentes formes. En l’occurrence, s’appuyant sur l’expérience Van der Waals décide que u est proportionnel à  et aboutit à son équation.

Prenons par exemple l’azote (N2), ses coefficients sont  et  ; on a

.

Traçons quelques unes des isothermes (T est en degrés K) :

fig. 1 : Isothermes

On voit sur ces courbes qu’au dessus d’une certaine température le comportement est celui des gaz parfaits ; en-dessous de cette température la courbe présente deux « bosses » que nous allons essayer d’interpréter.

Mais avant cela dérivons p pour voir son sens de variation :

 (1).

Le numérateur est donc du troisième degré, ses racines peuvent se calculer moyennant les formules de Cardan, mais ce n’est pas tellement ceci qui nous intéresse : il s’agit du point où la courbe change de forme ; à cet endroit la dérivée s’annule (tangente horizontale) ainsi que la dérivée seconde (point d’inflexion). On a

 (2).

Appelons v la racine cherchée : de (1) on tire

 (3)

d’où

 ;

en écrivant que (2) est nul et en  remplaçant :

d’où après simplification :  (on voit ainsi comment b se mesure).

En remplaçant dans (3) on a le T qui correspond :

et enfin la pression correspondante :

.

Les valeurs obtenues sont appelées volume molaire critique (), température critique () et pression critique  du gaz. Dans notre exemple (l’azote) on obtient ,  , et .

On peut alors introduire des variables sans dimension

 et réécrire l’équation de Van der Waals dans ce cas :

avec

, , ,

ce qui donne  l’équation générale

.

Si on mesure le facteur de compressibilité Z obtenu par

suivant les différents gaz et que l’on compare à celui obtenu par le calcul l’adéquation est quasi-optimale[1].

Quelles sont les interprétations physiques de ces valeurs ? Représentons une isotherme avec  :

 

fig. 2 : Règle du levier de Maxwell

 

A une pression peuvent correspondre deux volumes distincts ; chacun de ces volumes correspond alors à un état différent de la matière : à  l’état liquide, à  l’état gazeux. La température critique correspond à un seuil au dessus duquel on ne peut pas liquéfier le gaz, et ceci quelle que soit la pression.

Plus fort encore pour la température de la courbe à bosses les deux états de la matière coexistent : pour 1 mole les proportions molaires x1 et x2  = 1 - x1 sont les parties liquides et gazeuses ; à l’équilibre thermodynamique l’intégrale de p(V) le long de la ligne fermée MONQPM doit être nulle ce qui donne

,

soit encore

d’où

.

Il existe alors un point N0 de la courbe où cette égalité est vérifiée ; ce point N0 détermine un segment M0P0. Au point P0 la matière est entièrement dans l’état gazeux et occupe un volume , au point M0 elle est entièrement dans l’état liquide et occupe un volume  ; à chaque point S du segment M0P0 la matière occupe un volume .

C’est la « règle du levier » de Maxwell (par analogie avec le th. des moments de la Mécanique) que nous allons regarder de plus près.

fig. 3 : Vue de P en fonction de V et T

3. Retour aux équations

En Thermodynamique la plupart des équations sont obtenues de manière empirique, particulièrement dans l’équation du viriel. L’essentiel de la validation est alors obtenu par comparaison des résultats mathématiques aux résultats expérimentaux.

Par exemple on peut considérer que l’équation des gaz parfaits PV = NkT n’est que le début du développement en série suivant :

B(T) est le premier coefficient du viriel, C(T) le deuxième ,etc. On peut également à faible pression effectuer le développement en puissances de  (puisque dans ce cas on estime que la loi des gaz parfaits règne en maître), ce qui donne

également appelé développement du viriel.

Dans le même ordre d’idées reprenons l’équation de Van der Waals :

et considérons que

.

On obtient alors

.

Pour des pressions faibles et des températures élevées on a

 est très inférieur à 1 et on peut faire un développement limité du dénominateur :

 ;

on a alors un nouveau développement du viriel ; à température élevée le premier coefficient tend vers b, soit le volume occupé par une molécule.

 

Comme vous avez dû vous en apercevoir en traçant les isothermes, certaines montrent des régions à pression négative ainsi que des régions mécaniquement instables (là où la dérivée de p par rapport à V est positive), régions où le gaz pourrait se comprimer lui-même… En fait ce sont les transitions de phase qui permettent de lever ces contradictions : 

 

 

Si on reprend notre figure pour une isotherme donnée, en partant du point P on voit que le volume augmente puis diminue jusqu’à N ; à pression constante (sur la ligne (PN)) le volume de gaz diminue et passe en phase liquide ; pendant tout ce temps il existe une « surpression » que l’on appellera pression de vapeur  ; lorsqu’on arrive en N cette pression de vapeur s’annule puis devient négative, on entre dans la phase de sublimation ; en fait si on avait alors des pressions négatives cette partie de la sublimation ne se produirait pas, le gaz passerait directement à l’état liquide (de N à M).

Considérons maintenant l’énergie interne du gaz U(VT), fonction ne dépendant que du volume pour une température donnée. La différence d’énergie entre Vg et Vl est donnée par

Sg et Sl sont les entropies des phases gazeuse et liquide pures. En fait DU peut se calculer le long d’une trajectoire à pression constante () ou le long d’une isotherme (U est une différentielle exacte) ; on a donc

- à pression constante

 ;

- à température constante

,

soit après intégration

.

En égalant ces résultats on tire

ce qui permet théoriquement de déterminer  ainsi que Vl et Vg avec l’aide de l’équation initiale.

En fait il y a une interprétation géométrique beaucoup plus simple :

est l’aire du rectangle sous le segment PM, l’autre intégrale est l’aire sous l’isotherme de Van der Waals entre P et M, ces deux aires doivent donc être égales. On en déduit donc que les deux aires délimitées par PQN et NOM sont égales ; les deux calculs sont équivalents.

 



[1] Voir Prigogine et Kondepudi, Thermodynamique, p 31.